• Enteteroulemaloute 5
  • 29 Avril 2017
  • 20171218 134510   Copie 2

annickcham

C'est Tan Tan qui marque l'entrée dans le Sahara occidental.

Tan Tan, on dit que l'on doit son nom à des nomades puisant l'eau, à cause du bruit « tan tan » que leur ustensile faisait en frappant la paroi. L'entrée de la ville est signalé par on couple de chameaux (dromadaires...), Tan Tan, c'est aussi le début des contrôles des passeports. Les choses ne sont pas encore réglées entre marocains et sahraoui. Nous sommes régulièrement arrêtés, le contenu des passeports recopié à la main sur un registre, quand on en aura marre, on leur refilera des photocopies. Pour l'instant, on prend ça du bon côté, ça fait une pause, parce que nous retrouvons ici notre ennemi, le vent. Il y a plusieurs sortes de vent, le léger, le moyen, le fort. Aujourd'hui, c'est le débile. De côté de surcroit. Le vélo en crabe, nous sommes hyper concentrés pour résister aux bourrasques, ne pas se faire déporter au milieu de la route. Au passage d'une petite colline à la sortie de Tan Tan, c'est l'enfer, on a du mal à tenir sur nos montures, je me dis que le premier bus qui passe va nous faire gagner les 1200 km nous séparant de la frontière. Et puis, quelques km plus loin, à Tan Tan plage (el Gouatia) un restau servant du bon poisson nous réconcilie avec la vie et même avec le vélo, on repart, on recommence à rouler comme des forcenés, voulant gagner un oued pour la nuit. Avec ce vent, c'est pas gagné. Enfin, un virage, et hop, changement de direction salvateur, vent dans le dos, l'oued Chebika se rapproche vite cette fois, on se pose vite dans un trou dans le sable pour s'abriter un peu, on ouvre la boite de sardines dans la tente, et basta, dodo. Au petit matin, c'est l'orage qui nous réveille, pas beaucoup d'eau, mais assez pour être obligés de faire les tartines dans la tente... Et très rapidement, tout est sec, nous sommes gratifiés d'un beau soleil. La pluie a laissé la place au ciel bleu, les quelques nuages apparus se sont volatilisés aussi rapidement qu’ils sont venus.

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C'est la région des pêcheurs de falaises

19 Novembre, il y a pile poil 2 mois que nous sommes au Maroc, nous faisons une halte dans l'hôtel « Paris Dakar » de Akfhenir. Une journée de repos, avec comme d'hab lessive, courrier...

Petit déjeuner à la terrasse du restau, beaucoup de taxis collectifs font un arrêt, le temps que les 7 passagers se dégourdissent les jambes, aillent aux toilettes, boivent un café au lait. Ils viennent souvent d'Agadir, ils ont déjà parcouru quelques centaines de km coincés sur leur siège.

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A un moment donné, il y a 3 Mercedes garées devant nous, tous les passagers sont au restau et les 3 moteurs tournent. Bruno attrape un chauffeur et lui demande s'il veut bien couper le moteur. La réplique est nette : « ah non, li moteur, il faut qu'il reste chaud ». Alors Bruno lui dit que c'est une grosse connerie, que le moteur n'a pas besoin de rester chaud, que ça fait du bruit, ça pollue et ça gaspille de l'essence. Rien n'y fait. Le chauffeur part aux toilettes, et là, il lui vient une idée de génie, parce qu'en revenant, il vient voir Bruno et lui dit : « mon frère, tu me dis d'économiser l'essence, mais c'est pas di l'essence dans li moteur, c'est di gas oil ! ». Allez, laisse tomber, c'est comme si tu parlais écologie avec un poisson rouge...

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faux boucher !!! mais vraies côtes d'agneau, hyper bonnes. 

Il neige fort en France, plusieurs départements en état d'alerte. Pour nous, c'est tempête de ciel bleu. Nous roulons paisiblement quand on voit une voiture qui se gare en nous voyant; Ernst ! Ernst, rencontré il y a un peu plus d'une semaine à Mirleft. Rencontre éphémère au milieu du désert qui nous fait super plaisir. Nous allons faire un tour à la lagune de Neila, qui ne nous détourne pas beaucoup, l'endroit est joli, mais les flamands roses ne sont pas encore là. Nous nous remettons en selle, et là, on commence à trouver que la route pue la sardine, par endroit, c'est carrément pestilentiel. La raison ? Les camions de transport vidangent l'eau des poissons sur le bord de la nationale, parfois sur des aires aménagées, mais parfois, ils ne prennent pas tant de précaution, ils vidangent n'importe où, on en a même vu un balancer sa flotte nauséabonde en roulant. Ces camions sont remplis de poissons, certains de sardines qui iront se faire mettre en boite à Tan Tan, les autres poursuivront la route jusqu'en Europe, on les retrouvera au rayon poisson du supermarché, ou en boite, avec la photo d'un bonnet rouge dessus pour le marketing ! C'est pas le bonheur la mondialisation, la sardine qui parcourt des milliers de kilomètres, afin de bénéficier d’une main d’œuvre bon marché, conditions d’hygiène plus que douteuses en prime ?

Sardines reference

Exigez la sardine bretonne, méfiez vous des imitations !!! 

nousdune

La nuit est fraiche et un peu humide, nous prenons notre temps et attendons que le soleil vienne faire sécher la tente. Comme chaque matin, on se pose les mêmes questions, comment sera la journée, avec ou sans vent, si avec, dans quel sens ? Quelles rencontres fera t on ? On ne peut rien prévoir, ce n'en est que plus exaltant.

Alors, pour le coup, cette journée ci commence bien. Cette fois, on est dans le désert, dans le désert pour de vrai, autour de nous, le désert de petites roches que nous connaissions a laissé place à de grandes étendues de sable.

Beaux comme des camions ! 

beau comme un camion

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Parfois charrié par le vent, ce sable vient envahir la route, aujourd'hui, nous passons juste après le chasse sable, comme un chasse neige mais il pousse le sable sur les côtés de la route.

Le paysage devient vraiment beau, sable à gauche, sable à droite, une petite dune avec 2 personnes dessus qui nous hèlent, mais nous ne comprenons pas ce qu'elles nous disent. On les a dépassées quand on entend « cappucino ? ». Freinage rapide, marche arrière, nous grimpons sur la dune pour rejoindre Dogmar et Sirig et boire un cappucino. Des camping caristes tchèques fort sympathiques. On ne peut pas en dire autant de ceux qu'on a rencontrés jusqu'à maintenant, grégaires, coincés dans leur maison sur roue, n'aimant pas les africains et même en ayant peur. On a le sentiment qu'ils sont là juste pour le soleil !! Avis aux camping caristes , si vous nous offrez du cappucino en plein désert (ou même un bout de saucisson...), nous sommes prêts à revoir notre copie !

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C'est l'effet cappucino ! 

Tarfaya, la ville ressemble à une ville fantôme. Celle qui était, au temps de l’aéropostale, une ville importante s’est endormie, reste quelques militaires et le musée Saint-Exupéry que nous oublions de visiter... A la tombée de la nuit, arrivent 2 anglais en tandem, les pauvres ont des soucis avec la roue arrière dont la jante se fissure. Il leur faut trouver une nouvelle jante, mais une 36 rayons ce sera difficile, sinon, ce sera le bus..... Solide petit déjeuner, le carburant est dans le moteur, il ne reste plus qu’à pousser sur les pédales. Mais de relativement grosses averses retardent notre départ.

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Avec Chris qui bricole sa roue arrière

Il est 11 heures lorsque nous démarrons, 102 km à avaler, mais alors... c'est une chevauchée fantastique, nous avons vent arrière. Le désert à perte de vue, juste troué par un goudron noir en parfaite ligne droite, pas la moindre aspérité à l’horizon, nous arrivons à Laâyoune sans aucune fatigue, à 23 km/h de moyenne, cela ne nous est jamais arrivé de rouler si vite !

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Arrivée à la porte de Laayoune

Laayoune ne ressemble pas aux autres villes du Maroc. En ville, on remarque immédiatement une présence importante de l'ONU et de la police. Ceci est évidemment dû au problème "Sahraoui Maroc" ! Le référendum est attendu depuis 1991. Les femmes sont aussi différentes, beaucoup plus libérées, elles nous abordent dans la rue, rigolent avec nous.

A El Marsa, le port de Laayoune, nous faisons connaissance d'un cycliste marocain, Mohamed, circulant avec une remorque, rapide discut en espagnol, il pleut, nous ne voulons pas nous attarder.

mohamed

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Pluie, quartier industriel, il y a tout pour plaire ce matin !

Peu après la ville, notre route passe au dessus d’un tapis roulant de plusieurs kilomètres, il sert au transport du phosphate. Au loin sur l'océan, nous voyons les bateaux qui attendent leur chargement. C'est un peu étrange de voir ce tapis se perdre dans le désert, la mine se trouvant à plus d’une centaine de kilomètres. Nous roulons tambour battant, faisant juste un arrêt repas contre le mur d’une station de relais téléphonique. Les averses sont terminées, le vent s'est levé, nous sommes maintenant en plein soleil, mais c'est ça ou un vent débile, nous choisissons le cagnard.

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Nous avons déjà parcouru une cinquantaine de kilomètres et la pause est bien venue. Tomates et sardines engloutis , yaourt et dattes en dessert, nous reprenons notre route jusqu'à la station service de Lemsid. Nous recherchons un coin sans vent, il n'y a que le garage, alors vas y pour le garage. Et là, on voit arriver une jeune fille seule sur son vélo. Katarina arrive de Slovénie et va à Madagascar; nous l'invitons à partager le garage, et qui c'est qui arrive encore ? Le Mohamed à la remorque !! Sont là aussi Marc et Fatima, du Sud de la France, trop marrants ces 2 là, ils garent leur 4 X 4 devant l'entrée du garage, nous voilà bien protégés pour la nuit.

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La fine équipe

Le lendemain, nous perdons vite Mohamed qui pédale lentement, il est handicapé d'une jambe et sa lourde remorque ne l'aide pas, mais il finira par arriver à l'étape, la nuit tombée, on le voit arriver avec sa frontale. Nous sommes alors au camping de Boujdour avec des français fort sympathiques qui nous offrent un généreux apéro, liquide et solide. Ils font partie d'une association humanitaire qui oeuvre pour aider des mauritaniens. Bonne soirée avec eux. Vive Koteba, merci Louis Pierre et toute l'équipe ! Un bel exemple de générosité pour des causes justes.

Les photos qui suivent ont été faites à l'entrée de cette petite ville de Boujdour.

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avenue boujdour

Une 2 x 3 voies pour un cycliste et un bourricot

De nombreux aménagements de ce type ont été réalisés ces dernières années dans différents endroits du Sahara occidental, témoignant des ambitions de développement de l’urbanisation. Le Maroc développe son programme de « désenclavement » à coup de militaires, de pelleteuses, de construction de villages-fantômes en espérant que l’ensemble des autres nations le reconnaissent comme légitime sur ce territoire, ce qui n’est pas le cas. Actuellement, 80 pays dans le monde soutiennent l’indépendance du Sahara occidental. Pour assurer sa tranquillité et celle des occidentaux exploitant les richesses (poissons, phosphate, développement d'un parc photovoltaïque gigantesque dont l’énergie serait exportée vers l’Europe...et même le sable... qui est vendu à travers le monde pour la création de plages artificielles ), le Maroc maintient 160.000 soldats sur place et débourse 3 millions d’euros quotidiennement en frais militaires ....Le problème du Sahara est loin d'être réglé. Pour faire court, on va dire que le discours des Marocains du Nord est souvent « Le Maroc va de Tanger à Lagouira. Historiquement cette région s’appelle Sahara Marocain », mais celui des ethnies du Sud est plutôt « Le Maroc aux Marocains, le Sahara aux.. Sahraouis »…

A Boujdour, même si l'entrée de la ville est marquée par une méga avenue, complètement disproportionnée par rapport à la taille du bled, lampadaires et palmiers, dans la ville c'est terrains vagues, trottoirs défoncés et poubelles de partout. Le problème des déchets est terrible ici...pas ou peu de ramassage d'ordures, poubelles et sacs plastique jetés dans la nature. 

Quelques photos souvenir de notre étape à Boujdour, au risque de passer pour des obsédés de la bouffe et de la boisson....mais c'est vrai qu'après quelques jours dans le désert, nous apprécions d'autant plus les agapes et la convivialité !

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Le groupe de Koteba

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le groupe s'agrandit vec Geoffrey et Daniel

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Un drôle d'engin

Et puis, Mohamed nous quitte pour prendre le bus, la suite de la route l'effraie, c'est à nouveau le départ avec Katarina.

Annick Bruno Katarina

Pas de difficulté d'itinéraire, c'est plein sud, il n'y a qu'une route, la célébrissime N1, bien connue de tous les baroudeurs qui descendent en Afrique noire. il y a quoi sur cette N1 ? Des engins qui roulent très vite ! Des camions, beaucoup, plutôt respectueux de nous, des bus, des camping car, des voitures de tourisme et des 4 X4 de blancs, eux, ce sont les pires...Ils n'hésitent pas à nous frôler ou nous balancer des grands coups de klaxon dans les oreilles. Vraiment pas amicaux ces gens là, on doit les énerver quelque part, des cyclistes dans le Sahara, ça doit peut être balayer leurs rêves d'aventuriers de l'extrême.

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Alors nous sommes vigilants, toujours un oeil devant et un dans le rétro, et un manche à balai en travers du vélo avec un fanion au bout.

Zmeraj dobro razpolozena Annick

J'ai même imaginé coller un râteau de jardin au bout du balai ou un trident bien aiguisé. Seul le poids m'en a dissuadé. Car bien évidemment, il nous faut pas mal de vivres et surtout de l'eau. Nous avons 9 L d'eau chacun et des vivres pour 3 jours, nous ne manquons de rien, de véritables petites épiceries ambulantes. Et puis, là, coup de bol inouï pour nous, un camion s'est renversé sur la route, il ne devait pas aller assez vite...perdant son chargement de fruits et légumes. Oh l'aubaine. On s'est fait un gros ravito de tomates, citrons, poivrons, mandarines, oranges... on a dédaigné les choux, faut quand même pas exagérer !!

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72 km seulement aujourd'hui, la météo a tenu ses promesses : vent de face toute la journée. Du bord de la route, nous apercevons un campement de pêcheurs, nous sommes à peine arrivés qu'Ahmed vient nous offrir un poulpe...Il va même nous le cuisiner pendant que nous déballons nos réserves. Le repas est digne de princes du désert, nous mettons une sacré animation dans la petite tente, le poulpe est délicieux, notre entrée avocats haricots verts ne fait pas un pli, ainsi que les tomates persillées et la salade de fruits, les yaourts, les dattes et les petits biscuits. On ne dira pas qu'une partie de tout cela est comme on dit, tombée du camion ! Quand nous partons le matin, nous ne pouvons même pas dire au revoir à Mohamed, il est parti dans le brouillard, en bas de la falaise, dans l'eau froide, sur sa bouée pour attraper des calamars à l'aide d'un fil, et les poulpes avec un pic. Une land rover passera pour ramasser la "récolte". Ahmed gagne 15 dirhams par kg de poulpe (1,5 euros). Il reste ici dans le campement de fortune pendant une semaine environ avant de rentrer chez lui, quelle vie !

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Certains d'entre vous nous demandent ce qu'il y a à voir sur cette route, ce qui peut bien nous plaire à rouler comme cela au milieu de rien.

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C'est vrai, il y a peu à voir, aux alentours la végétation est rare, rase et sèche, parsemée de déchets en tous genres : pneus (déchirés ou pas), courroies, pots de yaourt, bouteilles et sacs plastique, canettes, parfois des os de chien ou de chèvre… C’est le désert, alors la culture de la poubelle n’a pas plus de raison d’exister ici qu’ailleurs. Mais justement, comme il y a peu à voir, nous vivons pleinement chaque instant, nous aimons vivre aussi dans cette simplicité, les journées sont occupées à rouler, installer notre campement quelque part, préparer le repas et chaque rencontre est une vraie fête. Les autochtones sont hyper sympa et les gens qui baroudent sur cette route sont un peu zarbis comme nous, du moins ceux avec qui nous avons des contacts....ceux qui nous doublent à fond vitres baissées sont très très différents...

Souvent pour le soir, nous visons les stations service, quand il y en a, c'est surtout pour trouver un endroit abrité du vent, et c'est ici que l'on peut refaire le plein d'eau et de vivres.

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Est ce que nous avons pris assez d'eau ??

Ici, nous allons installer notre campement derrière la station, parmi les détritus et carcasses de voiture. Un flic nous demande de déménager et de nous installer sur la terrasse de la station, pour notre sécurité, bla bla bla,faut voir comme ils prennent soin de nous.

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Avec les proprios de la station service

Le matin, « le responsable de la sécurité » donne un coup de fil à un de ses potes pourqu'il nous trouve le prochain lieu où nous serons en sécurité, bla bla bla, et là, quand on arrive au village fantôme de bin Azaram, il y a Mardouf qui nous attend au bord de la route et nous installe pour la nuit dans un bureau, qu'il nous demande de fermer à clef !

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Bir Azaram city !!

Dans la nuit, on a entendu marcher dehors, sûr que c'était Mardouf qui venait s' assurer que tout allait bien. Contre toute attente, et sans doute parce que quand on s'est déchaussés chez lui, un fumet étrange a fouetté les narines de ce pauvre Mardouf, ....il nous fait profiter d'une douche. Imaginez, en plein désert, de l'eau chaude qui arrive plein pot par un tuyau de 100 mm de diamètre. Alors qu'ils cherchaient du pétrole, des prospecteurs ont creusé jusqu'à 920 m sous terre et malheureusement pour eux, au lieu du pétrole...il y avait de l'eau.

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Eh Eh, ça vaut bien une photo grand format !!!!

Dans la soirée, alors que nous finissons notre repas, arrivent 3 képis de la gendarmerie royale, spécialement dépêchés depuis leur bureau à 80 km, pour vérifier que nous sommes bien là et que tout va bien. On boit le thé ensemble, bonne rigolade en racontant diverses histoires, et le lendemain, quand nous arrivons à leur check point, ils nous accueillent en hurlant « ah, voilà Bruno, Suzanne et Katarina ». Suzanne ? Qui c'est Suzanne ? C'est Annick, mais ils ont utilisé le 2ème prénom, ces cons !! Bon, on ne peut pas trop leur en vouloir, surtout qu'ils se sont avancés vers nous les bras chargés de mandarines, mais quand même, « Suzanne » ils auraient pu le gueuler moins fort !!!

Nous sommes maintenant au PK 40, c'est à dire à l'embranchement qui va à Dakhla et qui nous oblige à faire un aller retour si on choisit cette option. A gauche, on va vers la Mauritanie, à droite, on s'engage sur la presqu'île. Hésitation pour Katarina qui est pressée de rentrer en Mauritanie à cause de son visa, finalement elle s'engage avec nous. Vas y donc pour Dakhla, avec, pour commencer, une grande baie encore vierge d'hôtels, seulement des campements pour kite surfeurs. Nous circulons dans un poster, la lumière du soir adoucit les contours, les petits amoncellements de sable scintillent au dessus de l'eau.

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Re check point au PK 25 (nous ne sommes plus qu'à 25 km de Dakhla), il est un peu tard et le vent contraire nous incitent à rester ici. C'est l'erreur, nous échouons dans un campement de ......, ah mais je vous jure, des graves !!! On ne fera pas plus de commentaire, la photo suivante est assez éloquente je crois.

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En fait si, on est obligé de faire un peu plus de commentaires ! Car là franchement....imaginez 3 cyclistes qui viennent de se taper 800 km de désert, arrivant dans un lieu envahi de camping car pleins à craquer de bouffe et de boissons. Je précise qu'il n'y a rien dans ce campement, ni eau ni épicerie, rien. Et bien, non seulement il n'y en a pas un qui nous a demandé si on avait besoin de quelque chose, mais on a posé notre tente (par hasard) dans le « quartier des français », on les a entendus faire moult commentaires à notre sujet, mais il n'y en a pas un qui nous a adressé la parole.

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On s'en fout, on a eu un beau coucher de soleil

Euh, en fait, si, il y en a un qui nous a apporté 3 bières, fallait voir comme il était bourré, le Guytou ! Oulàlà,cette cuite, et comme il reste 4 mois ici, il a le temps de s'en mettre ! Bref, il en a rebu une, assis avec nous par terre, sûr qu'il en parle encore de la petite dernière avec les vagabonds !!! Heureusement, il y avait quelques marocains bien sympa (un moniteur de kite surf et des flics en civil) qui nous ont accueilli dans leur guitoune le soir, et puis aussi un groupe de jeunes allemands, c'est eux qui nous ont fait le café le matin parce qu'il pleuvait pas mal.

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Nous attendons la fin de la pluie pour repartir et gagner cette ville où nous allons rester 5 jours entiers pour régler des démarches administratives.

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Entrée dans la ville de Dakhla, le vent après la pluie.

Katarina nous quitte au bout de 2 jours, elle s'avance un peu en camion à cause de la date de son visa. Dommage, nous avons passé du bon temps avec elle, une très chouette fille, et sacrément courageuse. Dakhla n'est pas précisément une ville passionnante, mais elle offre au voyageur tout ce dont il a besoin. Nous avons séjourné dans un hôtel récent, simple et propre, Bougouffa qu'il s'appelle (pub !). Vraiment sympas Nasser et Samira, on leur fait à manger le soir (pâtes et ratatouille, pizzas aux calamars...), Samira fait le couscous à midi et Nasser est tellement content de nous avoir qu'il insiste pour nous faire une nuitée gratos. Même que si on veut rester encore on ne paiera plus rien du tout !! Mais au bout de 5 jours, il nous faut décoller quand même, la route est encore longue.

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Sortie de la ville de Dakhla, le vent sans la pluie !

7 Décembre. Après des au revoir émouvants, nous laissons Nasser et Samira à la gestion de l'hôtel, partons avec le vent de face, et c'est une lutte assez bestiale qui s'engage. A fond sur les pédales et le compteur qui ne décolle pas de 10 km/h. Nous sommes un peu découragés, car si cette presqu'île est absolument magnifique, nous l'avons déjà parcourue pour venir à Dakhla (A.R obligatoire sur 40 km pour aller en ville ), alors il n'y a même plus l'effet de surprise qui permettrait de faire diversion. Le vent, le vent et encore le vent..., il n'y a que cela qui compte, le paysage, on n'en a plus rien à foutre, ce qu'on veut, c'est avancer, avancer contre ce vent. Nous repassons devant le pk 25, il y a encore plus de camping car, mais vu l'accueil qu'ils nous ont réservé quelques jours plus tôt, nous n'irons pas nous y mettre à l'abri ! Re les képis, les mêmes questions, la fiche de renseignements. Pk 40, rebelote, heureusement qu'on a refait un stock de photocopies, et pas de mandarines, même pas de bonjour « Suzanne », tout fout le camp, nos potes sont en congé. Alors cette fois, il y a changement de direction pour nous, et c'est vent de côté. Le vent de côté, c'est le pire, car quand on croise de gros camions, juste après leur passage on reçoit comme une méga giffle, une giffle donnée par une main de 2 m2. Aujourd'hui, la giffle est accompagnée d'une poignée de sable, et cela à chaque camion qui passe. Faut fermer les yeux, serrer les dents et se cramponner au guidon. Station service, il est 17 h (la nuit tombe à 18h30) et on en a ras le bol, on se pose dans une piaule sordide, après avoir engueulé Hassan pour qu'il foutte un coup de balai et mette des draps propres, ou moins sales, il n'en a pas bien sûr. Il a intérêt à nous faire une bonne tajine, Hassan, sinon ça va barder.

Le vent hurle toute la nuit, mais à l'abri c'est bien, le sable ne rentre pas (pas trop...) dans la chambre. Petit déjeuner sorti du sac, car Hassan n'a que de l'huile et du thé, pain walou, confiture walou. Comment on fait un petit dej avec seulement du thé et de l'huile, hein ? Prévoyants, on a toujours une petite épicerie ambulante avec nous, pain, bananes, miel...Par contre, le Hassan a compris le message d'hier soir, car pendant que nous prenons le petit déjeuner, il passe devant nous en rigolant avec les bras chargés de draps ! Et bonne nouvelle, il a de la lessive, en fait, c'est juste l'idée qu'il n'avait pas. Quelques minutes plus tard, les draps sèchent en pleine bise, les suivants peuvent nous dire Merci !!!

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Il y a du vent ???

Le gag, c'est que c'est nous qui avons profité des draps propres !! Et ce pendant 3 nuits supplémentaires. Qu'est ce qui s'est passé ? Le vent a tellement forci que nous n'avons pas pu reprendre la route. Non seulement il est extrêmement fort, mais il charrie tellement de sable que nous ne voyons pas à 2 mètres. Quelques véhicules s'arrêtent à la station pendant la journée, même pour eux, c'est très difficile de rouler et il y a beaucoup de congères sur la route. Nous prenons notre mal en patience, lecture, écriture, on finit les mots croisés, le 3 ème jour, on en a assez de rester statiques, bravant ces intempéries, on va manger au village (une dizaine de baraques, à 4 km), à pied, on ne tiendrait pas sur les vélos. Il faut dire qu'on en a assez du menu de la station, tajine poulet patates à chaque repas. Il est vrai que pour 8 euros par personne la pension complète, on ne peut pas se permettre de faire trop de réclamations, mais au village, on se lâche sur des brochettes de chameau. Cette station est quand même sympa, familiale, on s'habitue à nos 2 compères, Hassan qui bosse beaucoup et son aide Mohamed qui n'en fout pas une rame et puis, il y a les habitués, qui viennent chaque soir boire leur verre de thé. Et chaque soir, Rachid qui vient nous raconter ses histoires de coeur ! A l'aube du 4ème jour, nous enfourchons nos biclous, et c'est parti, vent fort, mais de face et à peu près gérable. Viennent à notre rencontre 2 gars qui se disent avoir été mandatés par la gendarmerie royale pour veiller à notre sécurité. Ils nous suivent pendant une vingtaine de km, dans la R21 rouge, tapis de sol en alu rouge et peau de bique sur le tableau de bord. Nous leur disons qu'ils peuvent rentrer chez eux, basta l'escorte, et les rassurons en leur disant qu'on vise la prochaine station pour la nuit. C'est la pire que nous ayons connue. Le type est malgracieux comme tout, il nous permet quand même de dormir dans son atelier, il daigne à peine nous faire une omelette, mais on doit lui fournir les tomates, alors qu'on en a trouvé après dans son atelier !! On voulait les lui piquer du coup, mais on a oublié...Le matin, 8h 30, il dort encore, on tape aux carreaux pour avoir le thé, juste pour se venger, on a les boules, le groupe électrogène a tourné non stop toute la nuit !

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Est il utile de vous dire que la nuit suivante, on se l'est faite dans le désert, au diable leur sécurité à la noix, on a bien rigolé dans la tente, on les imaginait nous chercher de partout...

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13 Décembre. On a dormi comme des bébés, et on s'est réveillés trempés mouillés, une humidité incroyable. C'est sans doute la raison pour laquelle il y a davantage de végétation (tout est relatif) par ici. Partis par temps calme, mais le Eole a fini par se réveiller aussi, il se remet à nous souffler dessus, et il n'y va pas mollo. On trouve une antenne relais pour s'abriter pour la pause de midi. Mohamed nous propose de nous emmener en 4 X 4 pour les 40 km qui nous restent. Mais que nenni, Mohamed, on pensait trouver un vent de dos, on nous avait parlé du vent qui pousse vers l'Afrique noire, il n'est pas dans le bon sens, mais ce n'est pas pour cela qu'on va choisir la facilité, hein. Quelques km plus loin, on se dit qu'on est parfois un peu cons.

C de bir gandouze (appelé aussi Dakhmar), on s'attendait à trouver une ville, ce n'est qu'un petit village On prend nos quartiers au motel, car on projette d'aller faire un tour en voiture demain, visiter un village de pêcheurs. Une agréable visite en effet, accompagnés de 2 autres voyageurs, Gérard et Alexandre. Nous assistons au retour des bateaux, il n'y a pas besef de poissons aujourd'hui, la mer est trop agitée, mais le spectacle est intéressant, ainsi que la visite du petit « village, taudis, favella », on ne sait pas trop comment qualifier ces baraquements de bric et de broc. Nous essayons de nous faire discrets, ne voulant pas apparaître comme trop « voyeurs », mais pas de problème, on vient discuter avec nous, on va même nous offrir un pain, juste sorti du four.

Passe me voir au village, j'habite au 31

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Le lendemain, bien reposés, nous sommes fin prêts, mais au moment de charger les vélos, oups, on s'aperçoit qu'on nous a volé les compteurs. Eh oui, nous les avions laissés sur les vélos, une erreur de débutants, mais voilà, 3 mois au Maroc à laisser nos vélos un peu n'importe où, nous sommes en confiance, nous relâchons l'attention et paf, le problème arrive. Ce ne sont que des compteurs, mais ils nous sont très précieux, surtout dans les régions où il n'y a pas toujours les bornes kilométriques, bref, nous sommes contrariés. Le gérant de l'hôtel nous explique qu'il ne peut rien faire, car hier au soir, beaucoup de jeunes sont venus pour voir le match de foot, et donc autant chercher une aiguille dans une botte de foin. Il nous envoie à la gendarmerie. Le gendarme prend sa tête dans ses mains, c'est la cata, il n'y a jamais eu de vol ici, ça lui pose un gros problème, il va prendre un dépôt de plainte, lancer une enquête, puis l'histoire ira chez le procureur, oulà oulà, stop. Il n'est pas question de porter plainte, nous avons fait une faute, mais vu les proportions que ça prend, allons nous débrouiller tout seuls. Retour au motel, j'attrape le gérant, je lui dis gentiment qu'au final ce n'est pas si grave, puisque nous sommes maintenant en pension complète gratuite, nous avons le temps, ne partirons que quand nos compteurs seront revenus. Putain, ça lui fait un électrochoc, il part, et moins d'une heure après, il revient avec un compteur...encore une heure, et c'est le deuxième qui revient !!! Du coup, il est trop tard pour partir, il nous propose une nuitée de plus ici, à prix d'ami (sic !!!!), voilà, quand on n'est pas pressé, beaucoup de choses se solutionnent en Afrique !

La dernière étape au Maroc est fort différente des autres, plus de relief, plus de formes autour, nous roulons au milieu de roches sculptées par le vent et le sable. Le soleil est pâlot, une brume légère nous enveloppe, ajoutant encore de la magie à l'endroit.

Nous arrivons à Guerguerat de bonne heure, nous pourrions passer le poste frontière dans la foulée, mais ne connaissant pas trop les conditions de circulation dans le fameux no man's land, nous jugeons plus raisonnable de passer la nuit ici. Très vite, le petit hôtel est bondé, les chambres sont pleines, les salles de repos pleines à craquer, les tentes dans la cour itou, il y a peut être 300 ou 400 Sénégalais qui passent la nuit ici, ils rentrent chez eux pour assister à un grand rassemblement de marabouts le 22 Décembre.

Dans nos têtes, nous commençons à faire le bilan de cette traversée. Au final, c'était comment ce désert ? Alors, nonobstant les quelques courbes de la route et les rares petites dépressions creusées par des oueds asséchés, une fois faite abstraction du vent et de son bruit assourdissant, le Sahara Occidental, vu de cette Route Nationale 1, il est plat, lassant, ennuyeux, invariable, insipide, morose...Mais on peut aussi le trouver changeant, hypnotique, lunaire, jamais pareil, attirant, envoûtant, grisant...En fait, l'appréciation de ce désert est fonction des conditions atmosphériques et de son propre état d'âme du moment, en vélo nous avons largement le temps de découvrir toutes ses facettes. Concernant le vent qui a été notre fidèle compagnon, au début nous étions plein de doute sur notre capacité à lui résister, mais plus nous avancions, moins nous voulions céder à la tentation de grimper dans un quelconque moyen de transport. Quitte à attendre trois journées entières dans une station service au milieu de rien, avant de repartir pour les 4 dernières étapes. Non, Monsieur Eole, tu as beaucoup joué avec nous, tu nous a épuisés parfois, mais nous sommes des têtus, nous ne t'avons concédé aucun de ces km, les 1209 km de Sahara occidental, nous les avons parcouru sur nos bicyclettes.

 Maroc: the best en images

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La carte du parcours


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