• Enteteroulemaloute 5
  • 29 Avril 2017
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Bingo, au numéro 25, Kingsley est là. Merci le gps, sans lui, nous n’aurions peut-être pas trouvé. La maison se trouve en bordure de ville, dans une forêt. Toutes les propriétés ont des terrains immenses, 20 000 m2 minimum. Nous passons 2 nuits chez ce personnage haut en couleurs. Géologue de formation, mais aussi informaticien, sa spécialité c’est « la baro-acoustic décripitation » (pour faire simple, une technique utilisant mesures de pression et  géochimie  pour l’exploration des sols)

Fort heureusement pour nous autres béotiens, il a plus d’une corde à son arc. C’est aussi un fin cycliste, amateur de grands cols. Quand nous arrivons, il est en train de regarder le tour de France sur sa télé, le tour de l’année dernière ! Arriver chez Kingsley, c’est comme arriver dans une oasis en plein désert.

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Nous avons un local pour dormir, l’atelier informatique (photo ci dessus), l’accès à la salle de bain et à la cuisine, le plus important, parce que la fantaisie culinaire a été absente ces derniers jours. Alors ici, on se lâche, au grand ravissement de notre hôte, qui peut tranquillement vaquer à une activité qui lui tient à cœur en ce moment : la construction d’une machine d’analyse de minerais pour un chercheur de Mexico. Aux heures des repas, il se pointe à table et on refait le monde entre 2 bouchées. Kingsley voyage beaucoup, grâce à ses conférences, il met systématiquement son vélo dans l’avion et en profite pour sillonner les routes de la planète. Il aime surtout « la montagne, la baguette, le  vin », à peu près les seuls mots qu’il connait en français. Nous passons du bon temps avec lui. Il reçoit beaucoup de cyclistes du monde entier, il fait partie du réseau warmshower (hébergement gratos pour cyclistes, ce qu'on va faire chez nous), il est vraiment sympa, et a le bon goût d’habiter pile poil sur la route du Kakadu national park. 

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Cette route est assez chargée en voitures caravanes, et aussi en camions, mais au fil des kilomètres, elle s’élargit, il y a même parfois un « shoulder » (bande cyclable). Le vent est là, on l’a dans le pif, mais on gère. Nous faisons étape en fonction des campings, nous n’avons pas encore vraiment envie de dormir dans la pampa, nous ne le ferons que lorsque ce sera nécessaire, plus tard. Pour arriver dans la prochaine "ville", Jabiru,  il n’y a pas de problème, la plus longue étape sera de 103 km, entre Mary river retreat et Aurora Kakadu près de la rivière South alligator. Nous y verrons d’ailleurs des crocos, mais au loin. 

En route pour Jabiru (la ville, mais c’est aussi le nom d’un échassier) :

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J 200, c'est Jabiru dans 200 km

Le paysage n’est pas extraordinaire, c’est un genre de bush, mais de temps à autre, nous traversons un « wetland », un  marais où se baladent moult oiseaux. Sur ses bords jacasse tout ce qui vole : hérons argentés et aigrettes blanches, ibis sacrés, jabiru.

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La différence entre les saisons est telle qu’un lit de rivière asséché au mois de septembre s’emplira d’un flot impétueux de 3 m quelques mois plus tard. Pendant la saison sèche, les bras morts des rivières forment donc ces « billabongs » qui se couvrent de nénuphars et de fleurs de lotus roses. 

Le premier soir, au camping, nous allons préparer notre taboulé, damned, les tomates et le concombre sont restés dans le frigo de Kingsley. Taboulé sec, ce n’est pas top, mais la prochaine épicerie est à 150 bornes, et on ne change rien au menu qui a été soigneusement étudié pour plusieurs jours. Les cons. On retrouve une famille de jeunes français de La Clusaz, déjà vus quelques jours auparavant. Cool !

Second soir : cette fois, nous retrouvons Kim et Helen, des aussies que nous avons déjà vus plusieurs fois. Ils ont vendu leur maison en Tasmanie, acheté un camping-car et vont voyager jusqu’à mort s’ensuive (selon leur dire), et comme ils ne sont pas vieux, ils vont user quelques trains de pneus.

Troisième soir : on voit une grenouille maousse près de notre tente. Pas question de la laisser s’approcher, c’est une espèce redoutable, qui véhicule un poison mortel. Les moustiques ont archis féroces, on en dénombre 72 espèces dans ce pays. Saloperie. Des kangourous, on en voit souvent, mais ils sont farouches, pas le temps de sortir l’appareil photo qu’ils ont déguerpi. La frustration est grande, ils sont tellement mignons, surtout les mères avec les bébés dans la poche. On prend ça comme prétexte pour faire une entorse au planning des menus :  hum, délicieux filet de kangourou au retau du camping. La serveuse chilienne est hyper sympa, d’ailleurs, nous la retrouverons à l’entrés de Jabiru, la première ville depuis plus de 200 kil. Catarina veut venir nous voir en France, c’est aussi une nana qui travaille et voyage dans le monde entier, comme tous ces nombreux jeunes que nous rencontrons.

Les campings sont généralement bien foutus, avec un coin cuisine, une table et un frigo. Mais un soir, on arrive, le camping est miteux, il n’y a rien de tout ça. Voici le compte rendu de l’entretien, entre l’auteur (calimero) et le patron.

  • Monsieur, serait-il possible d’avoir un peu d’eau fraîche, celle du robinet des sanitaires est chaude et a un drôle de goût ?
  • Je peux vous en vendre.
  • C’est combien ?
  • 5 euros le litre et demi.
  • Euh, nous boirons celle du robinet, mais peut être pourriez vous nous donner juste un verre d’eau fraîche (on est là devant lui, suant sang et eau)
  • Moi ? Vous DONNER de l’eau. Non mais il n’en est pas question, vous avez qu’à l’acheter !

Je ne lui dis pas qu’on a déjà payé 20 euros pour son camping naze sans frigo, sans table, je ne lui dis pas non plus que les sanitaires sont à moitié cassés, je lui dis juste que j’ai en face de moi peut être la seule personne au monde qui puisse refuser de l’eau à des cyclistes.

Là, la bête s’enflamme et me dit qu’on est en Australie (merci, je ne savais pas) et qu’en Australie, soit on boit l’eau chaude du robinet, soit on l’achète.

Je préfère ne pas insister, vue sa carrure,  et lui mets sournoisement un commentaire pourri sur Wikicamp (la bible du voyageur en Australie).

C’est clair, on est en Australie, pas au Maroc où on te donne un régime de dattes le matin et un bidon d’oranges l’après-midi, on n’est pas en Turquie où on t’offre du thé à longueur de journée, ni dans n'importe quel pays d’Afrique noire où on t’invitera toujours à partager le repas…on est dans un pays à l’économie florissante, ici, on se fait un max. de fric, mais au royaume de la surconsommation, c'est chacun pour soi, va donc, eh, migrant ! Heureusement, les migrants n'ont pas que des déboires avec les australiens, comme vous le verrez plus tard.

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Nous voici à Jabiru, du nom d'un bel échassier.

C’est la ville du coin (un millier d’âmes), qui doit son existence à la présence d’une mine d’uranium dans les parages. Kakadu, le plus grand parc national d’Australie (20 000 km², la moitié de la Suisse), classé patrimoine mondial par l’Unesco abrite des mines d’uranium ! Mines dont l’exploitation est très controversée, vis-à-vis de la population aborigène, et des incidents d’exploitation qui ont lieu sporadiquement. Paradoxalement, le deuxième pays exportateur d’uranium au monde, ne possède qu’une centrale nucléaire sur son sol, seulement pour la recherche, et produit une énergie thermique extrêmement polluante à partir de ses gigantesques mines de charbon. L’utilisation de ce combustible est d’autant plus contestable que le réchauffement climatique semble, plus qu’ailleurs, se développer rapidement sur le continent. Vaste problème.

Que voir à Jabiru ? Pas grand-chose. Un hôtel à l’architecture intéressante (il a la forme d’un crocodile, mais n’est visible que du ciel…), un supermarché, un centre de santé, deux campings. Nous faisons à peu près toujours les mêmes rencontres, puisque tout le monde fait le même circuit, alors, tout ce petit monde nous double tous la journée et on se retrouve le soir. Beaucoup sont des retraités, ils conduisent comme des pieds (ils ne savent pas par exemple que leur caravane est plus large que leur bagnole) mais sont en général sympa.

Nous faisons un crochet d’une quarantaine de kil. pour visiter Ubirr, un site intéressant pour ses gravures rupestres (dont certaines ont 20000 ans). La datation des peintures est difficile car les pigments utilisés ne renferment pas de carbone, donc la datation au C14 n'est pas possible. Des indices indirects doivent être employés, basés sur les éléments représentés, comme par exemple des animaux dont l'espèce s'est éteinte ou des animaux vivant dans un habitat particulier qui aurait évolué au cours du temps.  Chaque surplomb de roche abrite des peintures : des animaux, des hommes, des mains (seuls les grands artistes avaient le droit, et ont toujours le droit, de peindre leur main). Les environs sont beaux, en particulier, on grimpe sur un point de vue, sous lequel s’étend une magnifique savane à perte de vue. A Ubirr, l’East Alligator River forme une frontière naturelle entre le Northern Territory et la Terre d’Arnhem. La route goudronnée se transforme en piste de terre rouge dès qu’on entre en terre aborigène, nous n’irons pas car il faut un permis. Nous observons des voitures passer la rivière, au moment adéquat (phénomène de marée), sinon, c’est une voiture de foutue..

Les fresques d’Ubirr ont souvent à voir avec la légende du Rainbow serpent (serpent arc en ciel). Un bébé pleurait parce qu’il voulait de la Sweet Lily Root (une racine sucrée de nénuphar). Les adultes se sont trompés et lui ont donné à sucer des racines amères d’un autre nénuphar, alors il a continué à pleurer toute la nuit. Le Rainbow serpent qui vivait pas loin l’a entendu et, énervé par ses cris, a emporté tout le village.

Puis à nouveau un joli site, Nourlangie, où l’on découvre un immense abri naturel sous d’énormes blocs rocheux, l’Anbangbang, utilisé depuis 20 000 ans comme refuge et support de peintures. Parmi elles, celle d’un charmant personnage, le Nabulwinjbulwinj qui dévore les femmes après les avoir assommées avec un ignam (un genre de patate).

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Et voici le petit teigneux qui crée les orages (en lien avec le serpent arc en ciel) :

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Alors là, c’est la baraka : une journée à buller à Cooinda dans un camping tout confort, ça fait le plus grand bien. A midi, un buffet géant de fruits et légumes, denrées rares et hyper chères (les tomates coûtent 14 euros dans le coin..., parcequ'un cyclone a ravagé toutes les cultures il y a quelques mois), alors vous imaginez, on s'est gavés comme des porcs.

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Le soir, on retrouve (comme tous les autres soirs) Naureen et sa famille, de Darwin, et nous sommes invités chez eux la semaine prochaine, juste avant de partir à Bali. Cool ! Pendant qu’on fait la popote, nos voisins, de charmants retraités nous invitent eux aussi dans leur belle propriété à Melbourne, euh, c’est à 4000 km…mais qui sait…dans quelques mois…

Mais on ne touche pas le gros lot tous les jours. Le lendemain, à11h30 on a fait 60 kil, et on doit prendre une décision : soit on fait 50 kil de plus et on arrive dans un lieu civilisé, avec camping digne de ce nom, station-service, restau, soit s’écarte un peu de l’axe principal et on trouve un petit camping (c’est wiki camp qui le dit…). La décision n’est pas facile à prendre car on a vent de face, allez, pas la peine de se crever, on reste au camping de Gundurul. Mais le vent chaud (un genre de sirocco) n’arrête pas, il fait une chaleur intenable, on renonce à la balade vers la rivière (qui d’ailleurs et à sec…). Et comme le seul endroit ombragé c’est l’arrière des chiottes, on passe l’après-midi là, à faire des mots croisés et à écouter la playlist adéquate, celle où il y a November rain.

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Nous renonçons même à faire notre pain, il faut dire que le dernier n’a pas été une vraie réussite…., mais faire du pain sans four n’est quand même pas franchement évident. Voilà, les jours se suivent et ne se ressemblent pas, mais c’est cela qui nous plaît.

parfois, le pain brûle...

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Parfois, c'est une oeuvre d'art, et il est mangeable...

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Nous quittons Kakadu après une nuit au roadhouse de Maryriver avec feux d’artifice s’il vous plait (1er juillet, c’est jour de fête dans les territoires du nord). Nous reprenons la route du sud (la fameuse stuart highway qui traverse l’Australie du Nord au Sud), une nuit à Pine Creek avec Kim et Helen (on se sera vus pratiquement chaque jour depuis 3 semaines…)

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puis un détour pour aller à Edith falls, un endroit fantastique. Nous y passons 2 nuits et une journée entière à faire une longue marche pour aller de vasque en vasque, de cascade en cascade, avec bain assuré à chaque fois, et sans croco...Par contre, nous verrons plusieurs serpents, dont un au camping, garé sous un vélo.

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Et puis, à Katherine, la ville de naissance de Cadel Evans, nous échouons chez Coco’s, un lieu particulier dont on vous parlera bientôt !