• Enteteroulemaloute 5
  • 29 Avril 2017
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Hamdullilah, welcome to Sudan. 

La frontière passée, il reste 40 km pour gagner Wadi Halfa. Nous nous reposons un moment dans notre logement « African style », à vrai dire, on s’attendait à pire, bien que sans fenêtre, la chambre est fréquentable. Les joues toujours en feu, mais les batteries rechargées, nous quittons le terrain vague sur lequel est construit El Rham, appelé pompeusement « hôtel » et nous avançons, les pieds foulant le sable. Il fait déjà nuit noire. Objectif : trouver à manger. C’est excitant d’arriver dans un nouveau pays, et l’animation qui règne ici nous plaît d’emblée. De petites tables sont installées le long de la route principale et des barbecues tournent à fond. Un jeune fabrique des jus de fruits frais, nous lui commandons des jus de mangues, comme il allonge ses jus avec l’eau du fleuve, je lui donne une bouteille d'eau minérale. Lui pense sans doute « Ah ces blancs,  ils ont toujours des idées bizarres », et moi je pense « je préfère passer pour une bégueule et retarder la venue de la chiasse ». Alors que nous attendons notre poulet pain riz, les voisins nous invitent à piocher chez eux. Ils ont pris une pizza, ah l’exotisme. Retour hôtel. Allez, kaput les mauvaises ondes, détendez vous, ils ont l’air bien gentils ces soudanais ! Un type promène un encensoir dans le couloir, nous avançons dans un brouillard épais, mais tout baigne dans une odeur délicieuse. 

Et pendant ce temps, ailleurs ? La télé diffuse des images des manifs des gilets jaunes. Ce que l’on voit de la violence à Paris est terrifiant. La France en guerre ?

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 Vous avez dit jaune ?

 

30 Novembre. 1ère chose à faire quand on arrive au Soudan : s’enregistrer auprès de la police. Nous sommes vendredi. « C’est fermé aujourd’hui, repassez demain. »

1er décembre.  Nous repartons nous enregistrer auprès de la police.  « Le chef n’est pas là. Repassez demain.» » Comment ça ? Vous nous avez dit ça hier. « Repassez demain ! ». 

Du coup, nous allons nous balader au bord du Nil, nous flânons au souk, Bruno s’achète une djalabiya (tenue longue, genre robe) blanche, qu’il fait couper en tunique, de façon à pouvoir pédaler avec…Incompréhension totale chez le tailleur. Ces blancs on décidément des idées bien bizarres.

Jeune berger au bord du Nil :

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La version tunique de la djalabiya :

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2 Décembre. Ça y est, le précieux sésame est apposé dans le passeport. 2 heures pour ça. Passer de bureau en bureau, photocopies, repasser de bureau en bureau, payer, faire signer par le type assis dehors sur une chaise bancale posée au soleil. Les sacoches bien garnies, Il est temps d’aller bouffer un peu de désert. Beaucoup de bovins sont raides morts le long de la route. Ces bêtes viennent de la région de Khartoum, et sont censées arriver au Caire. Elles ne finiront pas le voyage. Trimballées dans des camions en pleine chaleur, sans boire, celles qui crèvent sont abandonnées le long de la route. Il n’y a pas de mauvaises odeurs, il fait tellement sec que leur dépouille sèche au lieu de pourrir. La dernière vraie pluie date de 1998 ! 

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Nous rencontrons des gens qui n’ont jamais vu tomber la pluie, qui de toute leur vie n’ont jamais vu « l’eau tomber du ciel », comme ils aiment le dire. 

La chaleur n’est pas extrême, il fait même frisquet le matin. L’air est en permanence rafraîchi par un petit vent du nord, mais le soleil frappe vraiment fort. Parfois en fin de matinée, une escale est bienvenue dans un un boui boui  (appelé ici « Cafeteria »), pour manger, boire du thé. Dans notre première cafétéria, nous trouvons 3 soudanais, paisiblement couchés sur une natte. Ils  ne semblent pas être perturbés plus que ça par notre arrivée. L’un d’eux finit par se lever, nous prend dans ses bras, part chercher du thé et retourne bavarder avec ses 2 compères. 

Nous repartons sous le soleil ardent, il finira bien par se coucher, tout deviendra plus humain alors.  Ce soir, nous faisons notre première expérience de l’hôtel en plein air. C’est un endroit où on peut s'écraser sur un lit, mais en plein air.  Des camionneurs arrivent, chargent leur téléphone sur la multiprise alimentée par le  générateur qui tourne jusqu’à 22h. Certains camionneurs repartent, d’autres dorment à côté de nous. Dormir sous les étoiles sur un lit de cordes tressées, posé sur le sable, après s'être rempli le ventre de foul, (purée de fèves), de pain et de thé. Elle n’est pas belle la vie ?

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Le paysage est spécialement beau, rochers noirs sortant du sable, la route à peine vallonnée, on ne s'ennuie pas une minute. C'est beau et silencieux, de temps à autre, un camion nous double en nous klaxonnant joyeusement, nous tirant de la rêverie.

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A Abri, nous faisons escale àla Magzoub Nubian Guest House. Quand nous arrivons, il n’ y a que la porte d’entrée qui tient debout, et elle est belle cette porte. 

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Tout est en travaux. Le patron nous déclare que sa Guest house sera en parfait état dans 10 jours…Oui Magzoub, mais pour l’instant ???

« Je vais vous faire une place dans un coin ». 

Magzoub, qui travaillait pour une société de pétrole dans les gisements du Soudan du sud (jusqu’à ce que la région n’obtienne son indépendance), est un hôte affable qui parle parfaitement anglais. Parmi ses passions, les vieilles voitures, il roule dans une Mini de 1946, dans laquelle il a mis un moteur de Toyota Corolla.

Il aime aussi le vélo et depuis que nous sommes là, va souvent faire le kakou en ville en vélo couché. Il a mille histoires à raconter, voici notre favorite : Quand le gouvernement soudanais a souhaité de faire un barrage sur le Nil, ce qui aurait à nouveau englouti des terres, les Nubiens ont dit non, mais n’ont pas été entendus. Un jour, des représentants du gouvernement sont venus sur les lieux avec des responsables de travaux chinois. Les Nubiens ont pris les 3 chinois et les ont jetés dans  le Nil.  «Ils ne sont jamais revenus fanfaronne Magzoub ! »

Nous retrouvons Iosuf, voyageur espagnol, avec qui nous refaisons le monde en dégustant un excellent poisson chez Ousmane.

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Abri est un village vraiment plaisant. « Tamman ? » « Mia Mia ? » (« Ca va ? » « 100% ok ? ») : difficile de croiser quelqu'un sans ces interrogations à la fois discrètes et joyeuses. Ou alors, « sadiq, tamam? » (ça va mon ami?) avec un grand sourire ou un grand geste  ! Les Soudanais ont le coeur sur la main et font de l’hospitalité une priorité. Chez les pauvres comme chez les riches, en ville ou dans le désert, vous trouverez toujours quelqu’un pour vous ouvrir les portes de sa maison. Nous ne nous posons jamais la question de savoir où dormir.