• Enteteroulemaloute 5
  • 29 Avril 2017
  • 20171218 134510   Copie 2

L'inscription gravée sur le soubassement du très grand autel qui s'élève sur le Nemrud Dagh est reprise sur les terrasses orientale et occidentale. Le roi Antiochos y célèbre sa dévotion aux dieux et aux âmes divinisées de ses ancêtres, à la mémoire desquels il a fait élever des statues colossales. Au nombre de celles-ci figure la sienne: lui aussi deviendra un héros divinisé au lendemain de sa mort. L'autel est destiné à la célébration de cérémonies en l'honneur des dieux et des héros; des cérémonies dont Antiochos fixe la date et règle les rites dans leurs moindres détails: il prévoit le montant des sommes permettant à la population tout entière de prendre part aux banquets, définit le rôle des prêtres, celui des serviteurs et des musiciens, toutes dispositions et bien d'autres qui devront être respectées dans l'immédiat et dans les temps à venir. Et si l'un ou l'autre de ses successeurs s'avise de ne pas respecter les règles établies par lui, qu'il prenne garde...

Le grand roi Antiochos divin, juste, glorieux, ami des Grecs et des Romains, fils du roi Mithridate victorieux et de la reine Laodice divine, dévouée à son frère, fille du roi Antiochos glorieux, dévoué à sa mère, victorieux, grava avec des lettres éternelles le récit de ses hauts faits sur ces degrés consacrés.

Moi, tout au long de ma vie j'ai considéré que la dévotion aux dieux constitue le bien le plus sûr et la source de joie la plus grande pour les hommes; cette conviction m'a permis de connaître un très grand bonheur et de mener une existence heureuse.

Tout au long de ma vie il a été clair pour tous que je tenais la sainteté pour la plus sûre défense de mon royaume et pour la joie la plus précieuse.

Grâce à ces convictions, miraculeusement, j'échappai à de grands dangers j'ai triomphé aisément lors d'actions désespérées et j'ai mené une vie longue et heureuse.

mot" successeur du roi mon père, j’ai montré par mon respect pour les dieux que mon royaume est une demeure pour toutes les divinités et j'ai honoré leur statue, conformément à la tradition

à Zeus Ahura Mazda, à Apollon Mithra Hélios Hermès, à Verethraghna Héraclès Arès et à la Commagène, ma patrie fertile, ces statues dignes de leurs dieux.

D'une pierre unique sur le trône même des divinités bienveillantes, j'ai élevé une statue à mon effigie et j'ai ainsi restauré l'honneur ancien des dieux en leur faisant prendre part à des rites nouveaux. J'ai ainsi respecté la volonté divine qui me vient souvent en aide, alliée bienveillante, dans les guerres menées pour mon royaume.

Pour assurer la splendeur des sacrifices, j'ai attribué au sanctuaire une terre riche, j'ai choisi et établi un culte exemplaire et désigné des prêtres somptueusement vêtus de costumes perses; j'ai consacré des ornements et des rites de manière digne de ma fortune et de la grandeur des dieux.

Que tous ceux qui vivent sous mon règne célèbrent,, outre les sacrifices que la tradition a établis, de nouvelles fêtes à la gloire des dieux et en mon honneur.

Ma naissance, le 16 du mois d'Audnaios et mon accession au trône, le 10 du mois de Lôos, je les commémore par des célébrations des grandes divinités, qui furent mes guides tout au long de mon règne heureux et furent à l'origine de tous les bienfaits dont mon pouvoir bénéficia.

Quant au nombre et à la qualité des sacrifices, j'ai instauré deux jours de banquet pour chacune des fêtes annuelles. Pour ces fêtes et ces sacrifices j'ai réparti les sujets du royaume par cités et par villages dans les lieux sacrés les plus proches et j'ai décidé qu'ils prendraient part aux cérémonies de la manière qui conviendrait à chacun selon la proximité.

Quant à l'avenir, j’ai ordonné aux prêtres déjeter, chaque mois, le jour correspondant aux dates citées: le 16 pour mon anniversaire et le 10 pour mon accession au trône.

Afin que ces célébrations se Perpétuent et que les hommes y demeurent fidèles, non seulement en mon honneur, mais également pour le bonheur de chacun d'entre eux, j'ai effectué cette consécration et, suivant la volonté divine, j'ai fait sculpter sur des stèles éternelles la loi sacrée que toutes les générations - que le temps infini fera se succéder sur cette terre et dotera d'un destin propre - devront perpétuer; n'ignorant point que la vengeance implacable des démons royaux qui punit la négligence comme l'arrogance sanctionnera l'impiété et que, si elle est bafouée, la loi en l'honneur des héros sacrés, prévoit de lourdes peines.

Tout acte conforme à la loi divine élève l'âme; l'impiété, quant à elle, est sévèrement punie. Ma bouche a proclamé cette loi, la volonté des dieux l'a sanctionnée.

Décret Quiconque a été choisi par moi comme prêtre des dieux et des héros que j'ai placés au sommet des monts du Taurus, près du monument destiné à accueillir ma dépouille,, et quiconque, dans les temps à venir, remplira cette charge, libre de tout autre engagement, sans réticence et sans faux- fuyant, se dédie à ce monument, veille à son entretien et au respect des statues sacrées.

A l'occasion de mes jours anniversaires, lors des fêtes mensuelles ou annuelles que j'ai instaurées, chaque année et pour toujours, pour les dieux et pour moi, que le prêtre revête la tenue perse que ma bienveillance lui a fournie selon la coutume ancestrale de notre lignée, qu'il les couronne tous avec les couronnes d'or que j’ai offertes comme don pieux en l'honneur des dieux, et, utilisant les revenus des villages que j'ai réservés aux rites sacrificiels pour les héros, qu'il brûle sans les mesurer de l'encens et des aromates sur ces autels et qu'il accomplisse avec dignité des sacrifices nombreux en l'honneur des dieux et en mon honneur.

Qu'il garnisse les autels sacrés de mets adaptés, qu'il emplisse généreusement les coupes de vin, qu'il reçoive avec courtoisie tous ceux qui viendront, citoyens ou étrangers, et qu'il permette à tous à part égale de jouir de la fête.

C'est pourquoi, comme il convient du fait de sa fonction sacrée, il choisira sa part le premier; ensuite, qu'il distribue aux autres les dons de ma générosité afin qu'ils en jouissent librement.

Ainsi, chacun, durant les jours sacrés marques d'une grande abondance, pourra prendre part à la fête sans le moindre souci, banquetant là où bon lui semblera. Que tous, tant qu'ils prendront part au banquet commun dans le lieu sacré, se servent des coupes que j'ai consacrées.

Que tous les musiciens que j'ai choisis pour ces cérémonies et tous ceux qui seront ensuite choisis, leurs fils et leurs filles et tous leurs descendants qui pratiqueront le même métier soient laissés en paix, que personne ne les importune, qu'ils jouent lors des cérémonies que j'ai instaurées et qu'ils accomplissent leur fonction sans la moindre distraction aussi longtemps que les participants au rite le voudront.

Qu'il ne soit permis à personne – roi, seigneur, prêtre ou magistrat – de réduire en esclavage ces serviteurs du sanctuaire que j'ai offert aux dieux et à mon culte selon la volonté divine ; qu'il soit interdit de réduire en servitude leurs descendants qui leur succéderont dans leur fonction, et qu'il soit interdit de les céder à autrui en aucune manière ou de leur nuire ou de leur interdire d'exercer leur fonction ; que les prêtres veillent sur eux de même que les rois, les magistrats et tous les citoyens: en échange de la protection qu'ils leur accorderont, ils obtiendront la bienveillance des dieux et des héros.

De même, qu'il ne soit permis à personne de s'approprier, de céder à autrui ou d'endommager d'une manière ou d'une autre les villages que j'ai consacrés à ces divinités; il en va de même pour leurs fruits, que j'ai offerts aux dieux comme possessions inaliénables.

De même, personne ne pourra sans risques imaginer quelque prétexte pour bafouer, réduire ou supprimer, aux dépens de mon honneur, les sacrifices et les cérémonies que j'ai instaurés.

Quiconque projette d'anéantir la force sacrée de ces règles et l'honneur dû aux héros, d'y porter atteinte ou de s'y soustraire attirera sur lui et sur sa descendance la fureur de tous les démons et de tous les dieux. A tout jamais.

(traduit du grec ancien par Geneviève Lambert)